Le Rich Media, symbole de la publicité digitale, serait-il devenu un problème?
Débarqué à la fin des années 1990, le Rich Media amenait avec lui la promesse d’une publicité plus esthétique, ludique, impactante et, in fine, plus efficace.
Qu’est-ce que le “Rich Media”? Le Rich Media (ou Media enrichi en Francais) représente un ensemble de formats publicitaires prévoyant en leur sein une animation sonore ou visuelle (supersticiels, habillage, bandeaux animés, expand banners, etc…) permettant ainsi une meilleure immersion de l’internaute dans la publicité affichée et donc un taux de clics doublé, triplé voire décuplé par rapport à des formats publicitaires classiques.
Cependant, le Rich Media a ses défauts. Si certains d’entre eux ont été réglés, comme le problème traditionnel de la compatibilité du format pour des devices et/ou navigateurs inadaptés et/ou désuets - aujourd’hui, la grande majorité des devices et des navigateurs supportent ce format sans problème-, d’autres sont toujours d’actualité comme le caractère potentiellement intrusif et envahissant du format, mais surtout celui du ralentissement de la navigation de l’utilisateur.
En effet, le reproche qui a été fait à l’encontre de ces formats publicitaires, est d’avoir considérablement ralenti la navigation web et notamment la navigation sur mobile; les formats Rich Media pèsent lourd (plusieurs centaines de Ko voire quelques Mo) et augmentent, de facto, le temps de chargement des pages web.
Là où le problème devient véritablement problématique, c’est qu’il a en partie participé à l’adoption massif des Adblocks par les utilisateurs. Une étude d’Adobe et de Page Fair a ainsi révélé qu’environ 200 millions d’utilisateurs ont déjà installé et utilisé un plugin Adblock, représentant une perte de revenus potentiels estimée à près de 20 milliards d’Euros, et le format Rich Media est l’un des coupables mis en cause, ce que l’IAB (Interactive Advertising Bureau) a très bien compris.
Fait historique s’il en est, l’IAB a ainsi publié sur son blog un véritable mea culpa pour s’excuser sur la question : “On a déconné. En tant que technologistes, chargés d’apporter aux utilisateurs du contenu et des services, nous avons perdu de vue l’expérience utilisateur. [...]
Dans notre quête de l’automatisation et de la maximisation des marges [...], nous avons bâti une technologie publicitaire afin d’optimiser le rendement des budgets marketing des éditeurs qui s’était érodé au cours de la dernière récession.
Avec le recul aujourd’hui, gratter quelques centimes nous a peut-être coûté des dollars en loyauté du consommateur. Le système de reciblage rapide avec des publicités toujours plus lourdes a ralenti l’Internet du grand public et pompé plus d’une batterie. [...] Ce rouleau compresseur est venu à bout de la patience des utilisateurs.” [Scott Cunningham, General Manager à l’IAB Tech Lab]
Prise de conscience prometteuse et osée de la part de l’organisation porte-parole du Digital qui les a poussé à proposer des recommandations tenant en un acronyme : LEAN (Light, Encrypted, Ad choice supported, Non-invasive).
De ces quatre recommandations, l’on peut retenir la principale qui nous intéresse ici : Light (que l’on peut traduire par des publicités légères), on pourrait donc penser que l’IAB se positionne implicitement contre l’utilisation d’un certain nombre de formats Rich Media (par essence lourds).
Trop peu, trop tard ? Beaucoup le pensent, le Rich Media n’est certainement pas le seul responsable de l’adoption massive des Adblocks par les internautes mais il en reste probablement l’un des principaux.
Néanmoins, le phénomène Adblock n’est pas ou plus une menace pour le secteur. Tout d’abord sur le terrain du combat idéologique, les entreprises responsables de ces plug-in ont révélé leurs véritables motivations en faisant payer de grandes multinationales pour leur permettre de ne plus faire face au blocage de leurs publicité. Ensuite sur le terrain commercial car le phénomène Adblock reste suffisamment minoritaire pour ne pas mettre en danger les différents acteurs de la publicité digitale : certes près de 200 millions d’utilisateurs Adblock ont été recensés mais en 2015, on comptait plus de 3 milliards d’internautes, les utilisateurs Adblock ne représentant alors que 7% des internautes.
En conclusion, le phénomène Adblock aura servi de simple avertissement ; il a permis de penser la publicité différemment et initier un mouvement de réflexion sur son utilisation et sa diffusion, permettant de faire de la publicité consciente, qui prend en compte l’expérience de l’utilisateur et qui ne fait plus seulement de la publicité pour l’utilisateur mais aussi avec lui.